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Une promenade dans les contrastes

26 septembre 2020

L’automne projète ses contrastes. La journée a été chaude, douce pour les badauds qui, malgré le virus, ouvraient grande la bouche au soleil. Comme je devais aller chercher mes prescriptions à la pharmacie, j’ai décidé d’y aller à pied, puis faire quelques courses hâtives. Je ne sors pas beaucoup, j’en ai profité pour casser mes bottines neuves. Moi qui ai l’habitude d’écouter l’environnement urbain comme il se présente, j’avais opté cette fois-ci pour mes écouteurs et des mélodies éthérées. Mon regard, quant à lui, aveuglé par les sons, ne reprenait conscience que pour traverser les rues, juger de la dangerosité des passants et, tel un chat, il se fixait soudainement sur des contrastes de couleurs.

La saison en est fertile. La déliquescence rejoint la philosophie triste de ce qui circule dans mes veines. Chaque jour, je ne le répète que trop souvent, ou peut-être pas assez finalement, chaque jour donc je laisse le monde transpercer le rideau pourtant opaque de mon âme. Étrange phénoménologie que de taire ses pensées pour permettre la belle cacophonie des formes.

Huilt kilomètres plus tard, j’étais de retour à la maison, les pieds un peu endoloris tout de même. Les nouvelles bottines ne m’ont pas fait heureusement souffrir. J’ai pris une douche, me suis étendu sur le lit pour relaxer et j’ai sombré dans un sommeil de début de vacances. J’ai rêvé pendant deux heures et demie. Je comprends mal les crampes qui j’éprouve souvent aux jambes et au pied. Ils sont musclés quoique nouvellement veinés de méandres dus à l’âge. Mon corps s’ossifie. Sur moi aussi les contrastes.

Si j’étais un moine au Tibet, aurais-je toutes ces sensations ? Si je m’évanouissais dans l’heure, qu’adviendrait-il du bagage longuement amassé ? Qui pourrait me proposer ses réponses tout en les gardant pour lui, elle ? Communiquons-nous ? Sommes-nous seuls ou fusionnés de manière si absurde qu’on ne s’en rend pas compte ?

Pourquoi est-ce aussi beau et inaccessible, bon et mauvais ? Ma cervelle, tel un vieux circuit, est saturée. Durant la nuit, la pluie des songes le lessivera afin que j’y marche à nouveau. Tel est l’acte de vivre.