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C’est un fou

18 février 2013

Je lève les yeux. Les grandes fenêtres de la station donnent sur l’étage supérieur et n’existent que pour nous imaginer un semblant de lumière, d’espace vers ciel. Le fou, lui, gesticule, marmonne et quoi d’autre. Il apparaît puis s’enfuit, se cale dans le coin, regarde par la fenêtre, gesticule davantage, enlève sa casquette pour aussitôt la remettre. Ses gestes sont aussi démesurés et chaotiques que ses pensées.

En dessous, avec moi, les gens ordinaires, normaux, bien mis et surtout relativement immobiles. Ils rêvent autant que le fou, là-haut, mais la cloison de leur esprit est étanche, articulée, sans fuite.

Il y a très peu de différence entre ces deux mondes. Qui plus est, si nous étions capables d’ouvrir le couvercle des marmites, il est fort à parier que nous y découvrions des mélanges plus ou moins culinaires de normalité. Nous sommes tous fous, égarés, mais nous savons nous tenir sur les bords d’un quai sans nous jeter devant le train qui passe.

Voilà, le train passe, ralentit, s’immobile, ouvre ses portes, délaisse sa cargaison, nous avale par la suite. Le fou n’ouvre aucune porte, toutes les fenêtres sont ouvertes. Il ne va nulle part, car il ne sait qu’il est à un endroit. Je ne sais sans doute pas davantage où je m’en vais, mais j’accepte volontiers de prendre le train et d’occuper mon temps à ouvrir et fermer des portes.