L’année 2018 est terminée. La compagnie pour laquelle je travaille offre à ses employés le congé entre les deux fêtes. Demain, je retourne bosser. J’ai profité de la semaine pour compléter les boiseries de la grande pièce. Je n’ai heureusement pas « travaillé » pour le bureau. J’ai pu lire, écouter plein de vidéos, méditer et chanter tout en posant les dernières moulures autour de mes drôles de plafonniers.
Ma maison s’est construite lentement. On peut maintenant apercevoir la fin du désordre. D’ici 2020, je le crois bien, tout sera terminé. Il faudra certes rafraîchir le bureau, car cela n’est plus un bureau. Il me faudra aussi mettre un jour des portes… Plus on pense que ça se termine, plus on voit qu’il reste tant de choses à faire. Un peu comme la vie, quoi.
Cet après-midi, j’ai pu passer l’aspirateur dans la grande pièce et j’en ai profité pour chasser la poussière dans ma chambre et dans la cuisine. Nous sommes le Premier de l’an. Le soleil s’affaisse encore très tôt. C’est à ce moment que j’ai vu cette lumière que j’aime tant. Si j’ai un regret de ne plus travailler à la maison est bien celui de ne plus pouvoir témoigner du soleil qui baigne en après-midi ma cuisine.
J’ai sorti deux clémentines, attiré un banc pour m’y asseoir en me donnant de la perspective. J’ai épluché les deux fruits. Le goût tant sucré qu’acide et froid m’a fait du bien. Sur le comptoir, les objets du quotidien et ceux qui trahissent l’activité du moment. Mes médicaments distribués dans deux piluliers, le sel et le poivre, le beurrier. Je dois descendre au sous-sol les retailles et les outils, mais ne le ferai que lorsque j’aurai fait un peu de place et de ménage dans la cave. Il est difficile de ne pas accumuler, car, comme les écureuils, on se fait des réserves pour soit bricoler soit, dans nos vieux jours, nous rappeler qu’il faut se dépouiller. D’ailleurs, ces retailles que je traîne depuis le début de mes travaux m’ont servi encore cet après-midi. J’avais des moulures plus que je ne le pensais. Et j’ai des outils que j’oublie d’utiliser.
Pas grave, j’ai respiré à fond, quatre ou cinq fois, en mangeant mes clémentines. J’ai observé la lumière, l’existence, les choses, et je ne me suis dit qu’une seule chose, que j’en dirai peut-être quelque chose plus tard.
La lumière du crépuscule ressemble à la solitude de nos corps. On y entend toutes les largesses de l’univers.
Un nouveau nombre nous hantera pendant 364 jours et on le laissera ensuite partir. L’humanité accumule, elle aussi, plein de trucs dans sa mémoire. Dommage qu’elle ne fasse pas souvent le ménage de sa cave, peut-être finirait-elle par user de la sagesse qu’elle a abandonnée on ne sait plus quand… Bonne année à tous, soyeux heureux, surtout en santé. Aimez-vous les uns et les autres, comme le petit Jésus l’a dit ainsi que tous les prophètes et les animaux de la planète. Cherchez l’équilibre en toute chose et rappelez-vous la lumière déclinante des jours. C’est la plus savoureuse, orange comme une clémentine, acidulée comme l’oxygène qui vous maintient en vie.