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Le chemin est partout

18 août 2019

J’ai lu en partie The Path is Everywhere, Uncovering the Jewels Hidden Within You. Il vaut la peine de transcrire ici le texte de couverture.

En m’inspirant de mon parcours personnel ainsi que de mon travail avec les autres en tant que thérapeute et guide, j’ai écrit The Path Is Everywhere avec l’intention qu’il serve d’invitation provocante, vivante et compatissante à réenchanter nos idées sur la guérison et le réveil spirituel dans le monde moderne. Tissant ensemble les courants de sagesse de la spiritualité contemplative, de la psychothérapie relationnelle et somatique et de l’imagination poétique, The Path Is Everywhere nous rappelle que la profondeur et la magie du monde sacré sont toujours là, enfouies dans nos émotions, nos corps, nos relations et dans le monde naturel lui-même. Beaucoup se sont lassés d’une longue recherche, épuisés par une quête sans fin pour s’améliorer, se maintenir tous ensemble, guérir toutes leurs blessures, et achever un voyage spirituel mythique. Mais vous n’êtes pas un projet à résoudre. Vous êtes un mystère qui prend forme, et vous avez les matières premières dont vous avez besoin, en ce moment même, pour vivre une vie d’une profondeur profonde, d’un but et d’un sens. Nous entendons beaucoup parler de l’éveil spirituel et de la joie profonde, de la clarté et de la paix qui en sont les fruits promis. Cependant, on ignore souvent les déceptions de l’éveil et les façons dont il peut briser nos cœurs et nous ouvrir à la réalité de la crucifixion, de la résurrection et de la transfiguration que nous sommes susceptibles de rencontrer en cours de route. Dans la hâte de convertir le négatif en positif, de manifester tout ce que nous croyons vouloir et de gérer notre vie dans un état permanent de « bonheur », nous perdons le contact avec la réalité qu’il n’y a pas de transfiguration sans incarnation de la croix noire à l’intérieur. Le cheminement pour devenir une vraie personne humaine est par nature désordonné, car il émerge directement de l’inconnu et exige une confrontation compatissante avec l’ensemble de ce que nous sommes. Alors que nous voyageons ensemble en tant que compagnons de route, engageons-nous à embrasser à la fois la joie et le chagrin du chemin, et à témoigner de la sagesse qui se dégage de notre expérience immédiate, que ce soit sous forme de tristesse, de félicité, de désespoir ou de grande joie. La grâce apparaîtra sous des formes à la fois douces et féroces, mais c’est toujours la grâce, envoyée de l’au-delà pour nous ouvrir à la plénitude radieuse de l’être.

J’ai aimé, au départ, cette proposition de tout ramener à la réalité première de l’existence. Trop souvent lisons-nous qu’il faut détruire les vieilles habitudes, qu’il faut retrouver l’enfant perdu, qu’il penser au bonheur si on veut l’atteindre. On se fait également dire que la dépression, c’est mauvais et le signe que notre nature est spoliée.

L’auteur exprime avec un beau style qu’il n’est nullement nécessaire de penser en termes négatifs. La dépression, le mal en soi, la tristesse, la souffrance font partie entière de l’existence. Il ne faut donc pas fuir ces états, à moins qu’ils soient pathologiques—cela est une autre réalité—, mais plutôt les observer, les ressentir, surtout les écouter afin de comprendre et d’atteindre leur source.

Restez près de votre tristesse et entourez-la de curiosité, de présence et de chaleur. Avec le feu de la conscience et avec l’allié de votre souffle, descendez sous l’histoire de la tristesse et dans le creuset du corps où l’essence de la tristesse demeure et fait sa demeure lumineuse. Partez pour un voyage au cœur des sentiments, des sensations et des images et dans la vie crue et tremblante qu’il faut tenir.
— Licata, Matt. The Path Is Everywhere : Uncovering the Jewels Hidden Within You (pp. 40-41). Kindle Edition.

Ceci est un propos carrément existentiel. La nature humaine est. Point final. Par cette acceptation aimante de soi, on parvient à relativiser la réalité, à participer à l’existence sans se faire ni promesse ni détresse. Pour paraphraser Camus, restez sur la corde raide entre deux certitudes.

Tant que nous suivons une approche spirituelle promettant le salut, les miracles, la libération, alors nous sommes liés par la « chaîne dorée de la spiritualité ». Une telle chaîne peut être belle à porter, avec ses bijoux incrustés et ses gravures complexes, mais elle nous emprisonne quand même. Les gens pensent qu’ils peuvent porter la chaîne d’or pour la décoration sans être emprisonnés par elle, mais ils se trompent eux-mêmes. Tant que l’approche de la spiritualité est basée sur l’enrichissement de l’ego, alors c’est du matérialisme spirituel, un processus suicidaire plutôt que créatif.
— Licata, Matt. The Path Is Everywhere : Uncovering the Jewels Hidden Within You (pp. 71-72). Kindle Edition.

Pour ceux et celles qui ont lu ces promenades, ils comprendront que cela rejoint également les quelques acquis que j’ai obtenus, soit par des lectures philosophiques, soit par la méditation ou simplement par l’observation de ce qui m’entoure.

J’ai tout de même cessé de lire, après le premier tiers, le livre de Licata. Dans son beau langage à la fois scientifique et poétique, il amène les lecteurs à tenter une spiritualité incarnée, et je suis tout à fait d’accord. J’aurais tendance cependant à ne pas utiliser le mot spiritualité. Je ne sais pas pourquoi. L’auteur parle trop du mystère et du sacré. Bref, même s’il se veut réaliste, il dirige son regard vers son ignorance en lui attribuant des qualités spirituelles. Son discours devient alors un peu circulaire. Si au moins il tentait de décrire ce sacré, mais évidemment, cela est impossible. Les Dieux n’ont pas à être nommés, j’en conviens. Ils n’ont pas alors à être réfléchis puisqu’aucune lumière ne peut revenir vers nous.

Alors, que faire ? Vivre comme un chat ? Dormir quatorze heures par jour et chasser les insectes ou manger ses croquettes de temps en temps ? Rien ne sert de pousser vers les extrêmes. Les acquis de la méditation, de la simple observation de ce qui nous entoure et de ce qui se meut en nous sont un roman qu’il nous faut lire et relire. Cette lecture de l’âme est en elle-même source de paix et de sagesse. Même la pire des brutes ne peut dire non à l’écoute mystérieuse de ce qui se trame en elle. Il y a toujours une promesse de rédemption qui sommeille en nous, qui est présente, et Licata fait probablement bien d’insister sur ce point. Et vouloir à tout pris le bonheur nous oblige à faire taire nos angoisses, à les emprisonner dans un cachot, silence qui se transforme par la suite en une Ombre, une névrose. Pour tous ces concepts, il vaut la peine de lire ce livre. Peut-être en continuerai-je la lecture un peu plus tard. Pour le moment, je suis à la chasse de mes propres archétypes, qui sont aussi probablement les vôtres. J’écoute ce que l’univers semble vouloir me dire, même si je m’abstiens de lui prêter quelques intentions.

Cela ne me servira peut-être, au final, qu’à ne rien dire de plus. Cela n’empêchera ni le mystère ni l’ignorance de continuer sa marche. Mais puisque la nature nous a offert en cadeau un beau bouquet d’interrogations, humons-le jusqu’à l’ivresse.