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Le cimetière des sœurs

15 avril 2013

L’endroit est paisible, idéal pour se reposer. Il s’agit du Manoir d’Youville de Châteauguay, ancienne résidence estivale ou de repos pour les sœurs grises, et maintenant un hôtel permettant les rassemblements, les réunions, les retraites, les fins de semaine chorales comme Ganymède fait chaque année.

Le manoir est situé sur une île qui n’en a que techniquement le nom, tellement la terre effleure la rive principale. Ganymède y était ce weekend pour une répétition intensive en vue du concert de juin. Tout s’est bien déroulé sauf pour moi, un peu avant midi, dimanche. Une migraine. Beaucoup de facteurs auront pu l’induire, dont le changement de nourriture. Je mange habituellement davantage de fibres que de gras et de sauces. Il y a aussi les répétitions intenses, la soirée de samedi, bien amusante. Or moi, quand je ris trop fort, le corps s’échappe comme un Vésuve, les tensions se liquéfient. Trop rire peut faire mourir ?

Ma chambre donnait sur une colline ceinte de pommiers rabougris habités d’une fatigue centenaire. Durant le jour, le paysage présente un calme quasi zen ou, pour certains, lugubre. Mais c’est la nuit que le paysage se transforme. Les lueurs de Montréal provoquent ombres et mystères. Et quand on sait qu’un cimetière du XIXe trône au haut de cette colline, on ne peut s’empêcher de penser aux anciennes prières, mais surtout aux fantômes.

Il n’empêche que j’aimerais bien y passer quelques semaines à cet endroit, nonobstant la nourriture fade. Être fortuné, je m’évaderais. Mais je ne le suis pas. Je suis comme nous tous, à manger du pain ordinaire, à vivre ma vie avec des outils de fortune, ce qui n’est pas plus mal.

Mais, encore une fois, il n’empêche. J’ai déjà en tête un roman à venir. J’en ai peut-être le titre : Les blessures quantiques. Je rêve beaucoup, c’est en partie à la mélatonine que je prends. Ma vie se drogue. J’ai soif d’extase. Et comme tous les pauvres, je range mes désirs dans des tiroirs bien raisonnés.