Si les gens heureux n’ont pas d’histoire, c’est que chaque jour ils demeurent bouche bée devant le bonheur qu’ils éprouvent. À mon compagnon, Pierre, pour cet étonnement et ce miracle si doux.
Un beau clin d’œil à Olivier, l’ami et le frère dont j’ai toujours rêvé...
J’ai écrit cette dédicace pour La Vie dure paru en 1997. Ces phrases gisent, telles des fleurs fanées dans leur vase sans eau, possédant une gentille beauté proche du mensonge.
Je les relis, surpris par le chemin parcouru, la distance qui aura dilaté, dans un premier temps, cette amitié avec Olivier. Je n’ai, en fait, que très peu de nouvelles de lui. Notre relation aura duré le temps qu’on y goûte. Oh ! À le revoir, j’en serais très heureux, il m’a apporté beaucoup. Nous nous sommes connus avec les balbutiements de l’avant l’Internet, du temps de Compuserve. Il vivait en France, à l’époque j’avais même tapé sa thèse ou je ne sais plus quel texte scolaire et lui avait transmis le tout par courrier terrestre. Ce n’était pas encore le temps des tweets et des passions instantanées. Olivier est venu s’établir un temps au Québec, puis il est reparti revivre en France.
Quant à Pierre, j’ai vécu avec lui pendant seize ans. Notre compagnonnage restera un beau sillon dans mon cœur et je ne renie surtout pas les bienfaits que m’aura apporté sa présence. Maintenant que nos pas n’empruntent plus les mêmes chemins, j’ai tout de même conservé ses coordonnées dans mon GPS sentimental. Il sait que, s’il se perd, je serai là pour lui proposer de nouvelles routes, tout comme je sais qu’il peut rectifier le magnétisme de ma boussole défaillante.
Il n’en demeure pas moins que cette dédicace a vieilli, ne me représente plus. Comme je m’apprête à relire le texte pour le publier en format électronique, je sais d’ores et déjà que je ne peux remettre cette inscription en début d’ouvrage, car je n’y suis plus, ce n’est plus moi.
Je me demande s’il en va ainsi de toutes ces envolées de début d’ouvrage qu’on lit constamment. Ce sont des marques, des traits témoignant de notre passage qui resteront sur le papier vieillit des livres. Or, puisque mes livres renaissent autrement, par ma seule volonté, sans aucune consécration, dans une nouvelle bibliothèque plus évanescente, sans doute plus appropriée à mon existence, je n’ai plus le goût de dédier ce que j’écris à quiconque.
Les fables, comme les sentiments, se fanent. Elles laissent derrière elles des parfums d’automne. La vie dure, comme le suggérait cet ouvrage. J’espère que mes histoires prendront plus de temps à se faner.
J’ ai relu quelques pages de ce texte. Étrange impression. Douce chaleur. Sans doute le livre de tous mes espoirs et de toutes mes fables.