en

Une méduse est...

5 janvier 2014

Mon premier ex m’a demandé, il y a quelques jours, de regarder sa carte du ciel. Bien qu’il soit diplômé à l’université, bien qu’il n’y prêtera qu’une oreille officiellement discrète, son cœur le pousse à entrer dans la tente du shaman. Je comprends le feeling ; malgré les tomes de raisonnements scientifiques vaguement écrits sur la chose, j’ai toujours conservé avec moi les cartes du ciel de mes proches et j’ai regardé moi aussi de ce coin de l’œil animal la réponse que pouvaient me suggérer les étoiles.

Je ne pars et ne veux partir de débat ici. Je ne lis pas les stupidités généralisées des astrologues. Pour savoir naviguer dans ces eaux, il faut étudier, en prendre et en laisser.

Pour mon ex, j’ai eu le réflexe de revenir en arrière et de regarder l’ensemble de sa vie tel que les transits me la décrivent. Il s’agit de grands thèmes, des idées, des pistes. J’ai regardé l’année 1983, l’année de notre séparation. Nous étions certes très jeunes, dans nos balbutiements amoureux. J’ai compris des choses que je garderai pour moi et pour lui. Puis, j’ai fait le même exercice avec mes données astrologiques. En enlevant le bruit anormalement élevé de ce genre de calculs, j’ai isolé les grands voyageurs du ciel, leurs passages sur des points sensibles de ma carte du ciel, ai découvert, avec quasi stupéfaction que l’arrivée de chacun de mes livres se faisait sous l’égide de Saturne, le sculpteur.

Il y sera, fin 2014, autrement cependant, plus stable, comme si les Mailles sanguines allaient se récolter à l’automne de mon art, belles et matures. Il y aura surtout Jupiter à l’ascendant, ce qui, en principe, dénote une étape de croissance importante. J’y vois de grandes voiles, un espoir.

Pour en revenir à mon bel ex (je le trouve toujours beau), je ne sais comment aborder « son ciel ». Non pas que j’y vois du malheur, mais je le connais finalement si peu. Trente ans se sont écoulés sans vraiment savoir ce que l’autre vivait, faisait. Si un psychologue a besoin de longuement interroger la personne devant lui avant d’offrir des pistes de solution aux problèmes soulevés, il en va ainsi de l’astrologue soucieux. Une carte du ciel n’est qu’un plan, un diagramme, une pierre de Rosette. Chacun mène sa barque comme il l’entend, chacun agit, conscient ou pas, selon la houle sur l’océan. Et l’astrologue doit savoir comment son client a mené sa barque.

Je me suis toujours dit que, si un jour je me retrouvais sans le sou, sans moyen, je ferais comme en 1984, lorsque j’étais sur l’aide sociale, je me remettrais à faire des cartes du ciel pour les autres. Mais l’eau a bien coulé depuis. Je suis un romancier qui aime raconter des histoires. Une carte du ciel est un bon moyen pour laisser aller son imagination. Je serais sans doute hésitant avant de jouer à l’imposteur d’avenir.

Je n’en suis pas là non plus. Uranus se levait à l’horizon quand je suis né. Je suis bel et bien un fils des regards kaléidoscopiques. Un arbre est un arbre, un arbre est une antenne, une antenne est une méduse, une méduse est une folie, une folie...