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Assécher ses ailes

22 avril 2024

Je mentirais que je ne voyais pas venir. Au beau milieu de l'acouphène du quotidien, la mélodie des astres ne se laissait pas submerger. Je l'écoutais sans l'entendre et il ne fallait pas être astrologue pour comprendre ce qui allait arriver. Malgré ma vigie, j'ai laissé les portes du fort grandes ouvertes. Je n'ai pas fermé les écluses. Le temps a fait le reste.

Les deux dernières semaines de quasi silence à la suite de la cessation d'emploi ont sapé vaillamment ces falaises que devraient être mon existence. Rien n'est moins certain que la vie, tout le monde sait cela. Si cela est écrit dans le ciel, personne n'est là pour en faire la lecture sauf soi-même. Il ne s'agit pas de la grande mort, seulement une petite fin, quasi un orgasme douloureux, pour ainsi dire salvateur, susceptible d'éclaircir, je le souhaite, le regard. Encore heureux que j'aie encore de ces éphémères jouissances.

Je suis de nature à m'emprisonner dans les rêves. Bien que je sois un fidèle travailleur, je ne possède pas la science abstraite conférée aux fourmis. On me confère de grandes qualités, mais je ne les vois pas vraiment. Je ne me reconnais pas dans le miroir, cigale se régalant de l'instant présent, aimant le stupre doucereux d'une prétendue poésie ou sagesse.

Cela ne paie cependant pas les factures. Je m'enjoins à reprendre les esprits qui semblent m'avoir oublié. Le vieil ange est déchu, assommé par sa chute. Il devra assécher ses ailes et continuer. Son orgueil est mort, vive la nudité. Ses ailes, me souhaite-t-on à coup d'honnêtes réconforts, se redéploieront.

Il me faut, en amoureux des possibles, embrasser l'incertitude comme une toile vierge sur laquelle peindre encore quelques traits de pinceau. La créativité n'est pas seulement un moyen d'évasion ; c'est une bouée de sauvetage - un moyen de naviguer dans les eaux traîtresses de l'incertitude et de ressortir plus fort de l'autre côté.

Ce paragraphe était inspiré de ChatGPT. J'ai changé les mots, car le robot n'a pas de véritable plume. Il ne vole pas si haut, pas du moins dans les cieux que j'habite. Son intelligence est morne et sans attraits, régurgitant une logique toute lexicale. Ça aide à remplir des formulaires et à pondre les scénarios d'Hollywood.

Au moins, visuel que je suis, j'arrive à me délecter des élucubrations que mes "invites" créent à l'aide de ces machines. Comment explique-t-on cela dans un curriculum vitae? Comment vivre?

Je trouverai bien.

Il y a trop de choses que je peux encore accomplir? À l'aide, quelqu'un, ou dois-je encore une fois me réinventer tout seul comme un grand? Poser la question est y répondre.

On a certainement besoin de moi. Mon père, si tu es au ciel, si le ciel existe, ou si je ne sais quoi de toi existe, réunis-toi avec le conseil de nos ancêtres et appuie sur les bons leviers pour moi, pour ma famille, pour l'Humanité toute entière.

Et puis, il y a le bonheur des autres qu'il faut nourrir pour pouvoir s'y abreuver à son tour.

Je me dois de remonter l'horloge toute mécanique des mes os. Ce texte risque de ne jamais conclure si je ne lui appose pas le point final.

Illustrations : Midjourney et DALL•E