Il ira comme le vent, je l’espère, ce livre, ce Falaise. J’ai rencontré cet après-midi mon éditrice, Annie Goulet. Elle voulait me remettre le manuscrit révisé. Il y a d’innombrables petites corrections, des petites choses qui ne sont, en réalité, pour la plupart, que les subtiles imperfections d’un texte maintes fois lu et remanié.
Le regard de l’autre est important, à cette étape, et je compte bien accepter l’une après l’autre les demandes de changement. Ce serait ma prérogative d’auteur de refuser, de m’en tenir à mon seul souffle. Or, ce vent, ce souffle de mon esprit, n’est qu’une effluve parmi tant d’autres. Je ne suis pas de ceux qui rechignent. L’effort a été donné ; on ne fait que polir davantage l’argenterie avant de la présenter à sa visite.
J’ai été ému par les propos chaleureux d’Annie. On la sent sincère, nourrie par les mots. Elle dit aimer les personnages, la manière dont j’ai pu les décrire, leur laisser le champ libre. Un même commentaire me fut fait, par une collègue de travail, à propos de L’Effet Casimir et des Années-rebours. « Je ne voulais pas finir tes romans, me dit-elle, je ne voulais pas quitter tes personnages. » Un autre ami m’a dit également la même chose, dans ces mêmes termes, à propos de Falaise qu’il a lu, il n’y a pas si longtemps.
Comment ne pas être heureux d’entendre cela ? J’ai le sentiment qu’on m’aime alors. Peut-être pas pour mon corps (anyway, ce n’est pas le but de ma parlure), mais mon esprit en tout cas. C’est déjà une imposante et humble victoire dans ce monde d’insensibles.
Direction janvier 2015 alors. Direction les grands vents de février. Je me remets à la tâche, presque trois ans, soit le 22 octobre 2011, après la première fin d’écriture (puisqu’il y en a eu tout de même quelques-unes par après...). Cela m’a semblé si long, déjà pour l’écrire (ce roman fête ses onze années d’écriture chaotique), déjà pour le soumettre et attendre, et encore cette attente de l’éditeur qui a pris son temps, lui aussi.
Mon précédent éditeur me le disait si souvent : rien ne sert de tirer sur une plante ; elle ne poussera pas plus vite. Il avait bien raison. Je reprends, pour ainsi dire, mon souffle. C’en est presque une litote.