en

La goutte d’eau qui ne voulait pas se dissoudre

25 novembre 2018

Qu’est-ce que la vie? Il est des penseurs pour cogiter inlassablement cette question, tel Karl Friston (qui a mon âge, mais qui possède un indice h, vraiment, mais vraiment supérieur au mien… En fait, mon indice de Hirsch est nul!)

Si j’ai bien compris, ce qui est vivant est ce qui s’organise. Par exemple, une goutte colorée tombant dans un volume liquide tend à se disperser. Si, par miracle, nous observions que cette goutte, commençait à se contracter, puis se détendre, puis se contracter de nouveau, nous serions certains qu’un mécanisme structurant est en place ou en devenir.

L’être vivant déteste les surprises, le chaos. Il combat la déchéance pourtant inéluctable des choses et des êtres. Il résiste à l’entropie en créant paradoxalement la sienne.

Ainsi, chaque entité vivante se compose d’une série de coquilles, de modules interdépendants (ou couvertures de Markov) https://fr.wikipedia.org/wiki/Couverture_de_Markov, possiblement mesurables. Le cerveau fonctionnerait donc de la même façon. Il se crée des interprétations ou mesures du monde et puisqu’il est le fruit même de ce monde, il en serait l’interprétation. Cette idée remonte à longtemps.

Cela me rappelle aussi cette lecture de jeunesse qui m’avait grandement inspiré, The Crack in the Cosmic Egg: New Constructs of Mind and Reality dans lequel l’auteur traite entre autres d’homéostasie, du « désir » d’organiser le monde, de le stabiliser (le défi étant de briser cette coquille pour atteindre d’autres compréhensions et stabilités).

Friston dit un peu la même chose, il me semble, avec ce que je comprends de son énergie libre que l’entité vivante tente d’organiser afin d’éviter les surprises. Ce principe peut s’appliquer aux troubles de la personnalité, aux soubresauts de la pensée que sont tout autant la schizophrénie que la dépression. Devant la sensation d’une perte de contrôle, l’esprit trouve refuge dans la première caverne venue. La plupart d’entre nous font face à ces turbulences avec plus ou moins de bonheur, les romans sont jonchés de ces histoires compliquées d’individus qui tentent de se sortir de la noyade. Pour d’autres, le combat est plus difficile. La bataille se gagne en la perdant. Alcool, suicide, perte de raison, tremblements, fièvre, maladie.

Les shamans et les prêtres en ont d’ailleurs tirés leurs conclusions, les neurologues la leur et Bouddha nous aurait enseigné un moyen de survoler cet imbroglio.

Maintenant, l’intelligence artificielle semble vouloir adopter ces mêmes mécanismes d’autorégulation. Pas étonnant puisqu’elle est le fruit de l’esprit humain qui cherche toujours à mesurer et comprendre le monde. Le principe derrière ce travail s’intitule l’active inference qui, en anglais, possède le même acronyme que l’AI…

Où toute cette volonté d’ordre nous mènera? Ça, mon frère, ma sœur, nous serons déjà morts avant d’en voir la fin.