Il y a des idées, des sons, des images, un vertige qui ne demandent qu’à vivre. Ils bouillonnent, piaffent, se montrent impolis. Ma tête est bruyante.
Il y a quelques jours, durant cette semaine où je n’ai cessé de travailler, urgence d’un client oblige, je me suis attardé sur un reportage traitant des papillons. Longue pause ailée dans mon esprit. Cet insecte fascine d’autant qu’il est menacé dans plusieurs régions de cette planète que l’on saigne à qui mieux mieux. Symbole préféré des femmes qui se le font tatouer volontiers afin de marquer une étape de transformation majeure de leur vie, car elles aiment les papillons, pas tant pour la délicatesse de leurs ailes que pour ce qu’ils représentent.
Pour se transformer, la chenille s’enferme, devient, dans son cocon, une véritable soupe. Il ne reste plus rien d’elle, qu’un magma de cellules vibrantes et qui, par l’ordonnancement militaire de leur destinée, se refondent en un être prêt à s’envoler. Phoenix discret, le papillon n’en parcourt parfois pas moins des milliers de kilomètres pour suivre sa nourriture ou se reproduire.
Quand j’observe, par l’œil des reportages, autant la beauté du monde que les actes vomis par l’humanité contre lui, quand je conclus que tout cela fait partie de ce que l’univers mijote, puisqu’il laisse faire pour le moment, quand je jette un regard sur ce qui m’entoure, que tout paraît si calme, en place, et pourtant si incompréhensible, quand mon oreille se tend, aux aguets, et qu’aucun dieu ne vient prendre la parole, je me dis qu’il se passera sûrement quelque chose. À moins que ce ne soit, tout compte fait, que mon altière imagination qui se prend pour Cassandre ou Napoléon.
Il y a des idées, des sons, des images, un vertige en volcan. Je bouillonne, piaffe, reste poli. Ma tête est bruyante, la caverne de mes pensées est vaste. Suis-je une chenille ? Suis-je en alchimie ?