Un ami m’a fait l’autre jour la remarque que je semblais triste, du moins d’après ce qu’il en déduisait à propos de mes livres et des quelques écrits transmis ici. Ma mère me faisait aussi la remarque, il y a longtemps, qu’étant jeune, je n’écrivais que des choses tristes, des poèmes troublés.
Je crois qu’il faut être forcément triste pour aller au-delà des apparences. Les gens « positifs », qui ne voient que le beau côté biblique des choses, les pharisiens de la certitude et de la rectitude, très peu pour moi.
Je n’ai pas l’impression d’être triste. Anxieux, certes, en attente, bien sûr, intense surtout. J’ai des amis intimes qui me connaissent mieux et qui savent que je suis un bouffon, une sorte de clown. Combien de fois ai-je entendu à mon égard : « niaiseux ! ». Et ils savent pertinemment que ma sensualité n’est jamais gratuite, que je ne m’offusque que très peu devant les tabous, tant et aussi longtemps qu’on soit sincères et heureux de vivre.
Mais, au final, oui, je suis triste, voulant comprendre ce qui m’anime. Toutes les caresses, tous les sourires, toutes les amitiés sont, pour moi, autant d’occasions de labourer mon existence, de la rendre fertile.
Je suis un plan de vigne accroché à son sol rocailleux. Et avec le fruit de mes gestes, de mes écrits, je tente de produire de l’ivresse.