Tu n’es pas là et je te cherche. Depuis mon enfance, ou peut-être bien avant, dans le centre-ventre de ma mère, ou dans les couilles-lances de mon père, j’aurais senti ta présence. C’est du fantasme tout ça. Mon père ne pensait pas à moi quand il embrassa ma mère. Que pouvait-elle imaginer alors? Quel était le but de leur danse à ce moment précis de ma conception?
Cela n’a pas vraiment d’importance de le savoir, mais c’est un jeu plaisant à imaginer ne serait-ce que pour combler ce vide de ton silence.
J’ai eu souvent l’impression de percevoir ton ombre, à défaut de ta lumière, quand moi, aussi en étreinte, je m’abandonnais à une promesse de je ne sais quoi. Les gens qui errent de flirt en flirt, je l’imagine, traquent ce goût d’opium dans toutes les bouches, les pores suintants d’insatisfactions. Mais il ne s’agit pas seulement de sexe. La soif, la quête est enfouie comme une rivière de lave profonde autant dans nos corps fertiles en pulsions que dans nos pensées branchées aux aurores boréales des mondes imaginaires.
Tu n’es pas là pour nous plaire, davantage pour nous guider? Tu es là lorsque j’écris cette note dans mon téléphone, lorsque j’apporte de la nourriture à ma bouche, lorsque je respire, pendant que je pense à mère, père, sœurs, amis, collègues et inconnus. Tu es là quand je veux offrir mon corps ou des paroles. Tu n’as aucun répit et tu t’amuses de moi quand je dors. Je me réveille souvent déçu parce que tes inventions n’étaient que des prétextes à vouloir me faire comprendre autre chose. Freud en a perdu ses dents tout comme son latin.
Tu n’es pas là parce que tu es partout. Je suis sans doute moi aussi ailleurs avec toi. Tu m’offres l’univers, il n’en tient qu’à moi, à nous, d’ouvrir le sexe de nos yeux.
Et puis, paradoxalement, tu te caches derrière la mort telle une vieille personne qui a honte de son corps. Tu es généreuse un temps, puis tu nous abandonnes à petit feu. On devient de nobles cloques qui s’éteignent au hasard d’un pendule qui va dans toutes les directions.
Je ne sais quoi ajouter d’autres, mais je persiste, je tourne en rond, je me frôle à toi comme un chat qui a faim. Je comprends les obsédés de s’obséder, je me dévore de passions à l’abri des regards et du tribunal de la bonne conscience. Je demeure virtueux, ne t’inquiète (mais tu n’as qu’à faire de ma pudeur, la preuve, tu me fais faire de ces choses en rêves…)
Ce texte pourrait ne pas voir de fin, et il serait inutilement long. Ta peau animale, tes cheveux célestes. Il ne sera jamais futile par contre de laisser le génie sortir de sa lampe pour inventer la suite avec l’espoir de demeurer éternellement à tes côtés, ma vie, et faire entendre aux autres l’étrange accord qui nous lie ensemble dans ton silence bienveillant et traumatisant.