Ce qui est inaccessible sculpte le sable de nos rêves. L’amant au loin, celui qu’on n’a pas ou celui qu’on voudrait bien connaître, la gloire issue d’un labeur ou de la chance, l’argent, la vie éternelle. On aimerait que le hasard fasse bien les choses, que les rendez-vous soient magiques, que de notre quotidien germe la paix.
On se mécontente divinement et si facilement de tout. Un peu plus de ceci, un peu plus encore de cela. La quête est sans fin, encouragée par les échecs, les malchances, le bonheur toujours en retard sur ses promesses. Il y a aussi ces petites morts, ces jouissances lascives, menteuses et infidèles, ou ces regards qui vous refusent leur profondeur.
On pense trouver la lumière que des ombres plus adultes que la raison surgissent du karma et redonnent aux jours les teintes de la nuit.
Quand on veut, peut-être qu’on pourra, se dit-on. Avec le temps, tout ira. On se contente de cette patiente philosophie. Les jours, les ans filent jusqu’à ce moment où l’on s’essouffle après avoir si longuement laissé chevaucher son esprit sur le dos de tant de chimères. On se demande alors à quoi ça sert tout ça, ces volontés incisives, ces aspirations océaniques et ces désirs théâtraux. On se dit que le temps, qui a toujours compté pour soi se fait soudain bien discret. La peur assèche la parole ; le cœur interrompt ses prières. Un ange, deux, trois et plus encore passent, nos espoirs accrochés à leurs ailes.
Et si cette soif pour ces êtres et ces choses, beaux et belles, n’était que l’expression d’un sentiment craintif face au vide ? Ah ! Qu’on en rit et qu’on se surprenne malgré le peu d’originalité de l’interrogation. Car tel est bien la beauté et la lourdeur du constat, qu’il n’y a pas de réponse, seulement une vivante obstination.