Sur le métier du roman, sept, huit, cent fois remettez votre ouvrage.
Il était grand temps que je me mette à la tâche. L’année 2013 aura été faite de surprises pour moi, à commencer par la signature du contrat avec VLB, puis le déclin de mes affaires et, enfin, l’emploi chez Spiria. Tous les chemins me semblent fertiles à nouveau, et même celui du chant s’éclaircit, se libère. Il se passe quelque chose autant dans ma tête que dans la gorge, le cœur. Puisse 2014 se poursuivre sur cette lancée.
J’ai donc repris le texte, tel que partiellement annoté par l’éditrice avant qu’elle ne s’arrête et me le remette afin que je revoie « l’oralité de mes personnages », à savoir le niveau de langage parfois un peu trop emprunté. Elle aimerait également que je décrive davantage les lieux, que je mette moins l’emphase en quelque sorte sur la théâtralité pour en revenir à une douceur plus littéraire.
Tout d’abord, je me débarrasse des tirets de dialogue, j’ose le guillemet français à la place. Muni d’une petite macro Word de mon cru, je défile les dialogues sans trop de peine. En enlevant tous ces tirets dans le texte, j’ai l’impression de redonner la voix aux personnages. C’est peut-être une illusion. Il n’empêche que mon texte est aussi très visuel dans sa manière d’être jeté au lecteur. Nous vivons à une époque d’images, de cadrage, de raccourcis symboliques. J’essaie, à ma manière, de dépoussiérer ma poésie et je ne veux surtout rien enlever au rythme des dialogues, de la vivacité et de la fragile spontanéité des sentiments.
Ajouter du texte est périlleux, car cela relève du premier jet et je ne voudrais pas trop paraître malhabile, m’enfarger dans la couleur de trop épais tapis de bonnes intentions. Les doutes m’assaillent aussitôt les phrases lancées. Bordel, trois fois le mot plateau, à quoi tu penses ? Et puis, des terrains en forme de rizière au Québec, tu déconnes un peu, là... (voir l’image). Bof, mon pays est totalement inventé. Je fais ainsi depuis L’Effet Casimir. Mon Québec demeure imaginaire.
Entrer de nouveau dans la tête des nombreux personnages du roman est à la fois émouvant et déstabilisant. Ils m’interpellent encore et je ne veux pas, en voulant les réécrire, les dénaturer, voire les biffer. Ces êtres imaginés sont autant d’échos de ma personnalité et je me dois de les faire vivre même si l’acte est, en soi, perdu d’avance.
Je ne sais pas ce que je suis, mais je me dois de communiquer, je me dois de sortir de la coquille dans laquelle je suis né. J’ai une mission et elle est inscrite nulle part ailleurs que dans ma volonté. Personne n’y peut rien sauf moi.
J’ai-tu hâte qu’il sorte, celui-là !
Et mon manuscrit s’intitule toujours Les Mailles sanguines. Je vais avoir beaucoup de mal, je crois, à décrotter le titre...